Before June
« Votre maman est morte. » Soudainement il se trouve plus que le silence, vous trois assis sur le canapé à fixer la gueule déchirée de votre père qui s'fend en pleure aux côtés de l'Auror du Macusa venu vous annoncer la nouvelle. Tu bouges pas, t'es pas capable - y a que la main de Thalia qui s'place dans la tienne qui t'semble réel à ce moment là. Parce que c'pas une chose qu'on s'attend à entendre à l'âge de dix ans. Pas plus qu'tu le comprends, vraiment. Alors tu restes là.
Sans doute que l'histoire aurait pas dû commencer là. T'aurais pu t'présenter, la seconde jumelle des Sanders : ta soeur s'nomme Thalia, et maman vous a aimé d'tout son coeur d'née-non-mage. Deux ans après, c'est Riley qui est venu agrandir la famille. L'premier fils - jusque là. Toi, t'as toujours regardé ton frère avec un brin d'fascination qu'tu savais pas expliquer, t'faisant tenir une distance entre vous deux. Tu voulais pas trop l'approcher, ressentant plus souvent d'la profonde jalousie que de l'amour inconditionnel, bien qu'tu savais pas alors pourquoi. Vous étiez heureux : Papa c'un sorcier doué qui bosse dans des magasins d'ventes d'baguettes ou d'objets ensorcelés pour qu'la vie soit plus simple. Maman, elle, elle tient un rôle d'politique dans le Macusa : du genre lié aux non-mages bien que t'ai jamais vraiment saisit quoi. Apparemment ca a pas plu à un type qui a décidé qu'le monde serait mieux sans elle pour défendre les droits d'chacun. Alors il l'a tué. Puis vous vous êtes retrouvés sans maman.
Maman est morte. Voila tout ce qu'il te reste en tête pendant des mois. Des mois durant lesquels t'vois trop de changement en toi, ce qui t'fait flipper. Ces changements qu'tu voulais pas - la première fois que t'as saigné dans ta culotte t'as fait une crise d'angoisse. Personne t'a prévenu, comme maman était plus là. Puis Thalia a fait quelques recherches, et comme t'as fini par avoir d'la poitrine t'as compris : c'est là que t'as commencé à être une fille. C'est là que t'as commencé à te détester. T'as cherché à arrêter le processus - t'as appris qu'en cessant de manger tu pouvais n'plus saigner, alors ca t'a semblé la chose logique à faire. C'était rassurant. Autant qu'de mettre des fringues trop grandes d'garçon pour n'pas montrer tes formes. T'vais pas une poitrine opulente - mais ca t'suffisais pour pas être capable d'te reconnaitre dans un miroir. C'était toi, mais pas toi - ça a jamais été toi, et tu l'détestais ce sentiment d'pas t'appartenir, d'pas te reconnaitre. D'être toujours étrange, jamais aussi heureuse et souriante qu'Thalia. Tu lui ressemblais assez pour faire comme elle, en mimétisme éperdu - histoire d'tenter de comprendre qui tu étais. Mais l'maquillage et les chignons changeaient rien - dés qu'tu te regardais tu pleurais d'rage à pas être toi. June Sanders. La blague - l'infâme mensonge. Et t'avais plus de maman. Papa parlait pas. Vous avez fait vos valises, un jour, puis c'était l'départ pour l'autre bout du monde. Papa s'est vu promettre un poste en Angleterre - pourquoi pas après tout. Pourquoi pas - sauf qu'tu avais autre chose en tête, comme tu mourrais de l'intérieure. A plus d'nourrir, ou pas assez, perdant du poids petit à petit, tu disparaissais.
Peut être que c'est ce que tu voulais - disparaitre. Et c'était qu'le début, d'ta disparition. Dans ta valise pour l'Angleterre il s'est trouvé un seul souvenir de ta mère que tu as décidé être à toi. Un bouquin aux pages jaunis, et cornées à plusieurs endroits, des traces de crayon gris entourant quelques mots et phrasés. T'souris toujours quand tu l'ouvres - et t'as pas cessé d'lire et lire encore ces lignes comme si elles allaient donner un soudain sens à tout cela.
Nous savons ce que nous sommes, mais nous ne savons pas ce que nous pouvons être. Hamlet, Shakespeare.
May the force
« Je vois de la compassion, une grande sensibilité. Un peu de malice, et beaucoup d'inquiétude. De la poésie - aussi - et de la loyauté. Hum... » C'est dans ta tête que ca résonne, la voix qui s'fait de plus en plus prenante alors que tu attends sans rien dire - tous les yeux fixés sur toi t'font sentir trop grande, et tu veux pas les voir. Tu veux pas - alors tu fermes les yeux et tu t'obliges à compter dans ta tête pour penser à respirer. Tu veux pas qu'ils te voient, tu veux pas qu'ils te remarquent.
« Poufsouffle. » C'un élan de hurlement de joie - tu les entends à peine quand en t'levant t'as les jambes qui tremblent. Quelques minutes après, Thalia qui t'rejoint, passe un bras autour de toi, et t'souris. Poudlard est une aventure que tu n'pensais pas vouloir vivre - mais vous avez passé l'été à faire vos achats sur le Chemin de Traverse, tenant la main d'Riley et de Papa pour être certaines de perdre personne. Thalia a voulu une chouette comme animal, mais t'as préféré un chat - l'tiens se nomme Chester et tu l'quittes presque pas. L'animal s'trouve aussi tendre et discret qu'il est attentif quand tu l'berces de quelques mots. Poudlard c'est pas une aventure que tu voulais vivre, et c'est pire encore quand tu t'sens constamment entouré de regards.
Poufsouffle est pas la pire des maisons, et tu t'y sens rapidement comme chez toi. Ca aide sans doute qu'Thalia soit là pour t'tenir contre elle dés que tu t'sens aller mal. T'as de moins en moins d'appétit - et d'formes aussi ce qui t'convient parfaitement. Les années défilent rapidement à l'école, et tu t'intègres à quelques clubs pour t'passer le temps : d'échec, de cartes explosives ou encore d'botanique. Tu prends plaisir à pas mal d'choses bien que ce que tu préfères c'est la Métamorphose. T'as trouvé là quelque chose de fascinant qui te tient éveiller la nuit. L'idée qu'tu puisse être toi, puis pas tant qu'ca finalement. La métamorphomagie et l'animagie deviennent d'passionnant sujets d'études qu'tu manques pas de découvrir autant que tu peux. Ca et la joie d'devenir une adolescente parmi d'autres. En troisième année tu surprends Thalia qui embrasse un garçon sous une branche de gui quand l'mois de décembre prend possession du château. T'sais pas quoi en penser - sauf que tu paniques à l'idée qu'un garçon puisse vouloir t'embrasser toi. Tu paniques pas d'embrasser un garçon - ou quiconque du reste - mais pas toi. Pas toi - ca t'arrive pas avant ta quatrième année. C'est là qu'les hormones jouent tant qu'pas avoir de petit ami c'est
la lose. Alors tu fais comme les autres - c'comme ca que tu fonctionnes. L'type était pas si mauvais, et Eliakim a toujours su t'faire rire. Avant d'fourrer sa langue dans ta bouche - tu supposes que c'était pas si horrible. Quand après six mois, alors qu'la fin de l'année allait avoir lieux, il a voulu t'poser une main sous l't-shirt, t'as paniqué encore. Tu savais que tu étais différente - Thalia aussi - et t'as saisis que d'Eliakim c'est son corps qu'tu voulais plus qu'lui. Son corps pour toi. Un corps d'garçon. C'est ca qu'tu veux.
Thalia t'as dit qu'elle trouverait ce que tu as. Qu'elle trouvera ce que tu es, ce qui t'manque pour t'faire sourire, avant qu'tu continue à te détruire encore. T'es un garçon dans le corps d'une fille - ca t'semble pas si étrange, c'est même un foutu soulagement quand elle t'le dit. T'souris soudainement, et tu t'sens mieux. Tu t'sens plus toi, dés qu'elle t'assure que t'es un
il et qu'il se trouve rien de mal à ca. Alors tu t'libères, prenant ton livre sur l'étagère de ta chambre, et tu ouvres à la première page qui t'viens - elle est cornée à force d'être lue et relue, mais ca t'fait plus de bien d'la lire cette fois :
L'imagination est si féconde en formes changeantes, que rien n'égale ses bizarres fantaisies. La nuit des rois. Shakespeare.
September ends
« Neal. Ca t'plait Neal ? » T'as rien d'mieux à faire qu'à lui sauter dans les bras, à ta soeur. Voila deux mois que sans cesse vous vous entrainez à des sortilèges pour t'faire disparaitre la poitrine, pour métamorphoser ton visage, pour qu'tu sembles moins à June, et qu'tu disparaisses parfaitement. Tu t'es vu dans l'miroir et soudainement t'as eut l'coeur qui a frappé à rythme normal dans ta poitrine. C'était toi - tu t'étais retrouvé, découvert, vu et t'as aimé ca. T'as aimé te voir - Neal. Neal Sanders. T'es né une seconde fois, dans c'monde de fou. Thalia t'as pas lâché - ca fait des mois qu'elle fait des recherches, qu'elle lie tout ce qu'elle peut d'littérature moldue sur les Transgenres, et sorcières sur la métamorphose humaine. L'changement de sexe est pas plus présent d'un côté que de l'autre - mais elle a trouvé comme elle manque pas de ressource ta soeur. Et t'voila - tu reprends les cours à Poudlard dans deux jours, et t'es toi. Dans l'train tu planes sur un nuage. T'as demandé à rencontrer l'Directeur pour demander à être changé de dortoir pour t'rendre chez les garçons.
Ca aurait pu être simple, sans doute. Puis ca l'a pas été. Alors qu'tu te sentais enfin toi, t'as tes amis qui cessent pas d'rire sur ton passage. Qui t'rappellent par l'nom de June comme si c'était rien - pourtant t'as pas cessé d'user d'ton nouveau nom. Puis ca a été pire - d'June t'es passée à abomination, à folle, à fou, à névrosé, à taré. Ces mots étaient d'terribles échos dans ta tête, et t'as été d'plus en plus discrets, d'plus en plus petits. D'plus en plus malade - n'plus manger à été une nécessité. Jusqu'à être si mal qu't'as demandé à pas retourner à Poudlard. T'as cessé - Papa pensait bien que c'était une passade jusqu'à te voir à moitié crevé sur l'pas de la porte. T'as pensé qu'tu vivrais pas une journée de plus à l'école, et t'as pu resté là cette année-là. T'as continué d'apprendre, mais loin du monde. Si t'étais morte pour renaitre homme, l'reste du monde le voyait pas ainsi - et t'aimais autant n'plus avoir à croisé ceux d'ton passé. Tu restais à la maison - voyant qu'Papa avait quelques rendez-vous avec des femmes - puis avec juste une femme. T'as été heureux, pour lui, vraiment. D'voir qu'il se rendait heureux qu'il continuait d'avancer. Qu'être courageux c'était à la portée d'tout le monde pour peut qu'tu te sentais prêt à t'lever contre le reste du monde. Alors t'as ressenti un brin d'espoir.
T'as passé cette année à lire, continuant à apprendre bien qu'tu savais que tu passerais pas tes BUSES tout de suite. Riley et Thalia ont continué les cours - toi t'as profité pour mieux t'apprendre. T'sais pas tant comment te comporter avec ton petit frère - puis ca te prendra tellement de temps qu'tu sais toujours pas des années plus tard. Tu savais pas être une grande soeur. Tu sauras pas être un grand frère. T'as travaillé un peu avec Papa pour t'faire un peu d'argent - c'qui t'as permis d'avoir une potion d'métamorphose constante. Comme ca t'as plus eut à faire les sortilèges pour ton torse. T'as juste eut un torse - et t'es ravie. C'était pas tout - tu découvrais alors un nouveau corps mais il était à moitié comme l'ancien. Tu t'formais plus en garçon, mais gardais des traits fins d'filles (et l'reste entre les jambes aussi). T'étais pas gênée, l'changement était pas soudain - ca t'convenait. Ca t'convenait d'aller doucement et de réapprendre à t'aimer.
Tout ce qui vit doit mourir, emporté par la nature dans l'éternité. Hamlet, Shakespeare
On ne pleure pas la perte d'un mal disparu. La comédie des erreurs , Shakespeare.
Hello December
« Il s'appelle Solstice. » Dis-tu en l'fixant à travers la table qui parle avec passion à un d'vos camarades. Thalia l'remarque, ton sourire en coin, et ton regard en coeur. Ca fait pas deux mois que t'es revenu en cours qu'tu as déjà le coeur qui s'frappe contre ta cage thoracique. Cette fois tu souffres pas du regard des autres - t'as fini par être oublié d'tes tortionnaires, et dans ta nouvelle classe y a personne qui t'avait reconnu d'avant. T'es plus personne d'avant, t'es juste Neal. Et Solstice, c'est un des types qui est dans ton dortoir, qui t'as pris pour nouveau venu d'Amérique - s'est proposé d'te faire visiter et d'être en binôme pour les cours. Solstice, c'un type magnifique, qui t'fait penser qu'en plus d'vouloir un homme, il s'peut bien qu'tu les aimes vraiment. Mais Solstice t'as jamais remarqué
comme ça. T'as essayé, d'quelques regards, des sourires, des chocolats, des sous-entendus - t'as essayé, puis t'as reçu que quelques rires et des sourires heureux. Mais rien - Solstice t'voit pas comme ca. T'as pas abandonné l'idée d'être son ami - tu t'fais présent, et t'écoute tout ce qu'il a à dire - comme il est foutrement intéressant. Tu passes l'temps que tu peux avoir lui : allant dans les soirées et dans les clubs où il s'rend aussi. T'es complètement obsédé sans doute.
Mais comme Solstice veut pas d'toi, et qu'tu as malgré tout l'désire d'aimer et d'être aimé - t'voila à sortir avec Syla. Syla s'trouve aussi beau qu'passionné, aussi tendre qu'loyal. T'pensais être prêt quand tu t'es mis nu devant lui - avec ton corps pas parfaitement masculin. T'pensais pas paniquer. T'pensais pas qu'il paniquerait aussi. Dés le lendemain ca a plus été qu'silence entre vous. D'première expérience terrible t'laissant un goût amer dans la bouche et un sentiment d'honte qu'tu sais pas encore ravaler. T'as essayé - mais t'as préféré cacher plutôt c'que tu étais. Pas parfaitement garçon. Plus vraiment fille. T'es entre les deux, t'sentant bien pour toi-même, mais clairement pas pour les autres. T'apprends encore. Et une amitié comme celle que tu as avec Sol t'aide à t'sentir plus toi : t'voila qui expérimente et apprends, découvrant l'monde et ce que t'aimes. L'punk, les Doc Marteens, les blousons rouge, l'maquille noir autour des yeux mais pas trop. T'aime toujours Shakespeare, tu cesseras jamais d'aimer Shakespeare. T'aimes lire - évidemment - la Métamorphose, les potions, la botanique, les animaux. Tu t'apprends - t'fumes pour la première fois, t'embrasse une fille pour la première fois, et t'aimes ca. T'aime tout ce que la vie t'met sur le chemin - la savourant pleinement pour la première fois.
Puis c'est Sol qui disparait. C'est arrivé après que vous ayez validé les BUSES. T'voila en sixième année. Et Sol disparait. Tu l'remarques parce que t'as eut c'regard hanté durant des années. Tu réapprends à vivre, et lui s'met à disparaitre parfaitement - tu l'remarques parce que tu vois toujours tout, à force d'craindre d'être pris en grippe et insulté encore. Tu apprends à observer, à voir c'que personne remarque. Quand il revient au dortoir au milieu d'la nuit en boitant la première fois, t'dis rien quand tu t'lève avec ta baguette pour soigner sa jambe. Et son oeil au beurre-noir. Tu tentes pas d'le faire parler - pas au début. Puis tu demandes qui, croyant pas aux escaliers vengeurs - tu lui dis ca aussi. Mais t'as rien d'mieux que le silence, et comme tu tiens plus à lui qu'à la vérité, tu continue c'jeu là. Tu fais de l'onguent durant tes cours d'potions, et t'en gardes pour ses retours nocturnes. Tu l'soignes, parfois quand il s'évanouit d'épuisement sur son lit - tu l'veilles, t'assurant qu'aucun cauchemars le réveil.
L'amour c'pas une chose que tu t'expliques. Papa s'est remarié, et sa femme t'semble adorable - il l'aime, sans doute, c'que tu lis dans ton regard. Tu t'souviens pas comment il regardait Maman, et tu veux pas lui jeter la pierre de vivre à nouveau. Pas plus qu'tu veux en vouloir à Caleb Anderson - ton nouveau frère - qui semble mieux savoir qu'toi comment agir avec Riley. T'sais pas aimer ton petit frère comme un grand frère - t'vois tout cela de loin avec un regard qui s'fait jaloux et envieux. T'apprendra sans doute. T'restes encore bien des choses à apprendre. Comme à aimer - mais Solstice c'est comme ca qu'tu l'aime. Qu'tu l'aime depuis longtemps - en silence comme tu veux pas qu'tout soit plus compliqué. Tu veux pas l'perdre, alors tu l'soignes pour qu'il vive encore. Tu peux pas t'empêcher de rêver, vraiment, et c'peut être pour ca qu'ton livre il est toujours ouvert à la même page depuis des mois :
Ces plaisirs violents ont des fins violentes. Dans leurs excès ils meurent, tels la poudre et le feu que leurs baisers consument. Roméo et Juliette. Shakespeare.